L’atypie langagière chez les enfants sourds

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L’atypie langagière chez les enfants sourds : une piste pour définir le développement du langage normal et pathologique dans les langues des signes.

Depuis 30 ans, les linguistes s’intéressent à la description linguistique des langues des signes (LS). Les tentatives de description qui s’en dégagent génèrent des positionnements théoriques et des questionnements terminologiques en permanente confrontation avec les langues vocales (LV).  Les LS fonctionnent elles de la même manière que les LV ? Peut-on dégager les mêmes structures et catégories linguistiques que dans les LV ? Peut-on les observer et les décrire avec les outils des LV ? En quoi le changement de modalité peut modifier le développement du langage ? Autant de questions auxquelles les linguistes et psycholinguistes des LS tentent de répondre. Dans la première partie du chapitre, nous aborderons rapidement la linguistique des LS, et plus précisément la description des aspects phonologiques et morphosyntaxiques. Nous verrons également comment les études psycholinguistiques ont mis en évidence les similitudes ou les différences structurales entre les LV et les LS. Enfin, car c’est l’objet de l’ouvrage, nous tenterons de comprendre le fonctionnement langagier typique et atypique dans une langue signée, et plus spécifiquement, en quoi latypie langagière peut être caractéristique d’un fonctionnement langagier typique ou pathologique. Cette réflexion sur l’atypie langagière se fera au regard de la modalité gestuelle et du contexte dans lequel les enfants acquièrent une LS.

Signes lexicaux de la LSF. On peut observer ici les articulateurs manuels et corporels (doigt, main, bras) combinés pour la production d’un signe. On peut également y repérer les paramètres manuels comme la configuration (index tendu, main 5 doigts tendus), le mouvement (représenté par des flèches, le nombre de flèches correspondant au nombre de mouvement), l’emplacement (main sur le visage, sur le torse), et l’orientation (orientation de la paume vers le locuteur ou l’interlocuteur). On peut également observer l’iconicité plus ou moins transparente à l’origine de la création des signes.  Si l’iconicité du signe [ARBRE] est claire, l’iconicité de [FILLE] ou de [PROFESSEUR] est plus opaque et il est nécessaire de connaître l’histoire du signe pour en deviner la trace imagique.

Schéma tiré de Cristini, 2014. Dans la description articulatoire du mouvement d’un signe, on fait la distinction entre 3 types de mouvement : les mouvements à trajet qui font référence aux mouvements articulés par l’épaule ou le coude, qui décrivent un trajet et qui déplace le lieu d’articulation, e.g. [DROITE] ; les mouvements internes avec oscillation, réalisés par le poignet ou les doigts, qui induisent un changement de configuration ou d’orientation, e.g. [DECHIRER] ; on parle de signe à mouvements combinés lorsque les deux types de mouvement sont présents, e.g. [PHRASE].